Quelques diplômes, un boulot, et un déménagement à Montréal plus tard, le nom de Toddy était souvent mentionné dans les cercles d’amateurs de baskets. Vu de l’extérieur, il semble mener une vie de rêve : une famille affectueuse, plusieurs entreprises florissantes, une carrière de DJ qui l’a vu ouvrir pour des artistes comme Dave Chappelle… et des baskets, beaucoup beaucoup de baskets (et non, ce n’est pas une faute de frappe). Les jaloux sont envieux, et pour quelqu’un qui a un travail aussi public que Toddy, on s’attendrait à entendre quelques ragots. Je ne supposerais pas qu’on n’ait jamais dit du mal du doyen de la communauté de sneakers Montréalaise, mais je peux témoigner que ça n’a jamais été fait en ma présence. Malgré un emploi du temps chargé, mon gars a fait en sorte de pouvoir pour me rencontrer à trois occasions différentes pour ce projet. On a mené notre entrevue au restaurant Junior’s, et quand j’ai remarqué que le son était dominé par une symphonie de réfrigérateurs industriels, Toddy était réellement excité à l’idée de tout refaire. « Je pourrais parler de basket éternellement », me réassure-t-il, et on a bien failli, en faisant plus de 20 minutes de notre deuxième entrevue avant de remarquer qu’on n’enregistrait pas.
Durant les premiers moments de notre entrevue initiale, Toddy avait l’air un peu agité. Je ne pouvais pas dire si son tumulte était du à une surabondance de responsabilités, ou au fait qu’un étranger s’immisçait dans son enfance. Quelque chose a changé quand on a commencé à parler des Philippines. Une posture raide cède la place à un comportement plus détendu, alors que Toddy raconte la migration de sa famille à Montréal, s’installant initialement à Cotes-des-Neiges avant de déménager à la Rive Sud. Malgré son départ à l’âge de deux ans, l’influence philippine sur l’identité du propriétaire de club est palpable. « En grandissant, on a fait en sorte de ne pas oublier nos racines », explique-t-il. « Mes parents ont essayé de nous apprendre, ou nous encourageaient à toujours parler, notre langue maternelle ». La maison des Flores reste décorée d’artefacts et de rappels culturels de leur pays natal, une esthétique qui s’étend au restaurant Junior’s. Perché sur un des murs de l’établissement, une fourchette et une cuillère en bois symbolise le coté communautaire de casser la croute, un aspect important de la tradition philippine. L’ardoise en dessous des ustensiles croisés lit « sarap », tagalog pour savoureux ou délicieux.